7 novembre 2016

Les aires de battage

Quand l'agriculture se fait "à l'ancienne"...

Il y a quelques sujets qui me fascinent plus que d'autres dans les îles grecques, et les anciennes aires de battage sont l'un d'eux. Les "alonia", aloni au singulier, émaillent le paysage des îles de manière agréable, quel que soit leur état. Elles témoignent d'une agriculture très peu mécanisée, sans émission de CO2 - bien qu'à l'époque où elles ont été construites, personne ne devait se soucier de ce point et encore moins des COP successives...
Ces "alonia" ne fascinent, va-t-en savoir pourquoi, toujours est-il que je les photographie de temps en temps, bien qu'elles aient toutes le même aspect. Quelle ne fut pas mon étonnement en voyant dans la dernière revue "You are here" de Sifnos, celle de 2016, qu'un article entier leur était consacré. Ainsi, je me sens moins seule avec ma fixette "aloni"...

J'ai déjà parlé en détail de cette publication dans mon dernier Billet d'humeur sur Sifnos, je vous laisse donc vous y référer, pour les plus curieux.
Évidement, j'ai lu l'article sur les alonia en priorité ! Bon, c'était quelquefois assez drôle, la traduction du grec en français n'a pas du être faite par une personne dont la langue maternelle est le français, et si c'est bien ce que je pense, c'est-à-dire que c'est un(e) grec(que) qui a rédigé la partie en français, je lui dit "Chapeau", il y a du vocabulaire spécifique compliqué. Par contre... si c'est un(e) français(e) qui a rédigé l'article... je confirme la baisse de niveau constatée à notre époque sur la maîtrise du français (entre autre)... 
Toujours est-il qu'il y a quelques tournures un peu bizarres dans ce texte en français, dont on comprend mieux le sens en lisant le texte en grec si on connait un peu ce langage, mais que globalement on apprend beaucoup de choses sur la manière dont les anciens grecs passaient de l'épi de céréales (blé, orge, avoine,...) sur sa tige aux grains en sac à porter au moulin (à vent, évidement).
Je vous invite à lire cet article, disponible sur internet avec le lien que j'ai donné, et à regarder les très belles photos qui l'accompagnent.

Alors, à quoi cela ressemble, une aloni ? Quand elle est bien entretenue, en usage, à ça :


Jolie, non ? Une grand espace circulaire dallé, maçonné et peint en blanc, avec un muret autour pour retenir les gerbes.
L'article de la revue explique en détail tout le mode opératoire, et je vais juste vous résumer ici les opérations successives à effectuer : le remplissage de l'aire de battage jusqu'en haut du muret avec les gerbes de céréales, le battage à l'aide d'une planche plate équipée de petites lames en-dessous et d'un animal genre âne, vache,... pour faire tourner tout le dispositif avec un humain dessus, les graines tombant progressivement au fond de l'aire et la paille restant au-dessus, le vannage et le tamisage, à faire par jour de vent favorable. Ce devait être très fatiguant, toutes ces opérations manuelles physiques. Selon l'article de la revue, une moiss'bat' (comme ils disent en Beauce et peut-être aussi ailleurs...) fait en 2 jours le travail qui prend un mois dans une aloni... 

On comprend donc pourquoi certaines alonia sont dans cet état :


Personnellement, je trouve cette dernière aloni plus "graphique" que celle bien proprette que j'ai photographiée plus haut.

Il n'empêche... certains habitants ont à coeur de les restaurer, non pas pour continuer à y battre leurs céréales, mais pour leur conserver leur aspect esthétique intégré dans le paysage. En voici un morceau en premier plan du beau paysage dans l'île de Sifnos :


En plus, par chance sur cette photo, il y a aussi un autre élément typique du paysage des Cyclades, le pigeonnier.

Je cite beaucoup l'île de Sifnos sur ce sujet, mais ces aires de battage se rencontrent dans toutes les îles, plus ou moins selon la conservation ou non du caractère rural traditionnel. Voici une photo faite à Folegandros, Ano Meria, en juin (2009) donc période de moisson, qui témoigne encore de l'utilisation d'une aloni au 21ème siècle. L'homme en haut est dans l'aloni en train de procéder au vannage. Je n'ai pas voulu trop m'approcher pour faire la photo, j'ai toujours des scrupules à jouer les touristes et je ne veux pas prendre mes sujets de photo pour des "singes à la foire".


Et je n'ai pas pensé à sortir tout de suite mon appareil photo du sac... J'étais fascinée par l'esthétique et la précision du geste qu'il effectuait pour lancer en l'air son grain accompagné de paille pour ne récupérer ensuite que le grain, la paille ayant été emportée par le vent.
Tous ces gestes et modes de vie s'en vont progressivement, et on va maintenant se fournir en farine au "Supermarket", mais sur ces îles rocheuses et pentues où beaucoup de cultures ne peuvent encore se faire que dans des petits champs dont certains en terrasse, ils continuent pour un temps à se perpétrer et à témoigner que le "zéro empreinte carbone, yes we can !" (quel charabia... mais je me suis lâchée en cette période de COP22 et d'élection américaine proche, l'une comme l'autre frisant le grotesque et le ridicule, cette opinion n'engageant que moi).

Et si vous voulez savoir à quoi ressemble la fameuse planche avec de petites lames en dessous qui sert au battage, il y en a une en très bon état de conservation dans la courette devant une maison à Artemonas :



Γεια σας !

2 commentaires:

  1. Un homme aussi amoureux des Cyclades ne peut ignorer Tinos, l'île magique!!! Là vous seriez dans votre élément. Si le meltemi vous pousse jusqu'ici venez nous voir à Pyrgos, le plus beau village du monde!!!
    Bon vent...
    dimitri dilinos

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    1. oui, Tinos est une belle île. J'y suis allée il y a quelques dizaines d'années, quand elle n'était fréquentée qu'en majorité par les grecs, et ce pourrait être un projet pour une prochaine année.

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